Texte de Delphine Didiot, photos d’Antoine Toursel.

Il aurait fallu plus qu’un peu de vent ou de grisaille pour décourager les huit participants à la journée organisée à Metz le 26 septembre. Les gens de l’Est en ont vu d’autres !

À CASA, nous aimons le Moyen Âge ; c’est un fait incontestable. Mais nous sommes capables de nous ouvrir à d’autres horizons. C’est pourquoi, après une journée messine plus « médiévale » il y a près de deux ans, nous avons choisi cette fois de nous tourner vers la facette contemporaine de la capitale lorraine.

Le voyage a commencé vers 1905-1908, à la gare. Nous avons suivi Marie-Cécile qui a éclairé nos lanternes sur la construction du bâtiment [1] et sur son décor sculpté, très original. Scènes de retrouvailles, corps de métiers au-dessus des anciennes boutiques… autant de détails devant lesquels les voyageurs pressés passent en ignorant ces particularités.

Juste derrière la gare, l’architecture futuriste du Centre Pompidou-Metz [2] nous attendait pour de nouvelles émotions. Nous avons pris le temps de déambuler à travers les différentes expositions en cours : « Le ciel comme atelier. Yves Klein et ses contemporains » ; « Des mondes construits. Un choix de sculptures du Centre Pompidou » et « Folklore ». Les œuvres nous ont interpelés et ont donné lieu à des discussions passionnantes, autour de l’éternelle question que nous pouvons simplement résumer ainsi : « Qu’est-ce que l’art ? » Les débats se sont poursuivis autour du pique-nique. Chaleureusement accueillis par Marie-Cécile et réchauffés par le thé, nous étions prêts à ressortir pour affronter le vent et les tonnes de béton de l’église Sainte-Thérèse.

Notre groupe sur le parvis pour le début de la visite de l’église Sainte-Thérèse.

En l’apercevant, certains se sont dit que les organisatrices de la journée avaient de drôles d’idées. L’église Sainte-Thérèse, en effet, au premier abord, ne paie pas vraiment de mine. Et pourtant… Menés par Léonard, paroissien passionné, tous les participants se sont laissé séduire et conquérir par le béton et la modernité ! Construite à partir de la fin des années 1930, l’église s’inscrit pleinement dans les recherches contemporaines autour de l’utilisation du béton armé. Sorte de cathédrale de béton édifiée par Roger-Henri Expert, elle trouve aussi sa particularité dans l’ensemble de vitraux (sur une surface de 1 600 m2) réalisés par le lorrain Nicolas Untersteller. Celui-ci a inventé pour l’église la technique du verre enchâssé dans du béton, ainsi que la « peinture de béton » qui donne beaucoup d’expressivité aux visages.

Éblouis par la visite et les couleurs à la fois vives et délicates des vitraux, nous poursuivons notre chemin vers la petite église romane Saint-Maximin. Cette église aux proportions intimistes et à l’atmosphère accueillante cache un joyau souvent ignoré des Messins eux-mêmes : un ensemble de vitraux dessinés par Jean Cocteau en 1962-1963, qui constitue la dernière œuvre de l’artiste. Nous avons pu bénéficier de quelques explications d’une jeune fille qui accueillait les visiteurs dans le cadre de différentes manifestations organisées à l’occasion du 800e anniversaire de la cathédrale. Dans des tonalités douces, Cocteau mêle symboles religieux, personnages mythologiques ou de conte, autoportrait… Dans une lettre adressée aux Messins le 24 avril 1962, il évoque la manière dont il conçoit son travail en ses termes : « […] une mise en place qui ne dérange pas le style de l’architecture romane, où le vitrail doit jouer un rôle comparable à celui des joyaux sur une femme, joyaux dont l’excès et l’énormité ridiculiseraient celle qui les porte. Tout le problème consiste donc à ne pas se laisser tenter et prendre au piège de la lumière et à réaliser un vitrail qui semble avoir été toujours là et n’être point un nouveau venu, mal élevé, parlant haut pendant la messe. » Pari gagné pour cet ensemble discret qui s’insère harmonieusement dans l’architecture médiévale.

Vitraux de Jean Cocteau, église Saint-Maximin.

D’après le programme, la journée devait s’achever ici. Mais, jamais lassés, nos pas nous ont menés jusqu’à la cathédrale Saint-Étienne, afin de repartir avec encore plus de couleurs dans les yeux. Cela grâce à l’ensemble exceptionnel de vitraux, et notamment ceux contemporains de Roger Bissière, Jacques Villon, et bien sûr Marc Chagall.


[1] Architecte Jürgen Kröger (1856-1928).

[2] Architectes Shigeru Ban (1957-), Jean de Gastines (1957-) et Philip Gumuchdjian (1958-).

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